Résumé
Dans des zones enclavées de la province de Zagora au Maroc, une association promeut l’inclusion socio-économique des femmes rurales grâce à la confection de serviettes hygiéniques lavables.
« Grâce aux campagnes de distribution de serviettes et de sensibilisation, les jeunes filles se sont réconciliées avec leurs corps. Elles ont compris que la menstruation fait partie de la femme et que ce n’est pas une anomalie. Cette libération de la parole a donné de nouvelles idées à l’association, telle que la confection d’autres articles ».
Le contexte et les objectifs
Dans les zones enclavées de la province de Zagora, certaines jeunes filles quittent le système éducatif à la puberté. Pour celles qui n’ont pas été préparées par leurs mères à la menstruation, se renferment sur elles-mêmes. Elles quittent l’école, parce qu’elles n’ont pas les moyens d’acheter des serviettes hygiéniques ou bien parce que leur école ne dispose pas de sanitaires. De plus, elles sont sujettes à des infections à cause des chiffons qu’elles utilisent lors de la période de menstruation.
En 2016, Fatima, une jeune diplômée, a décidé de créer à Tazarine l’Association Club des Femmes de l’Avenir (ACFA). Pour cela, elle a reçu l’aide de l’association française Leila & Nawelle, très active dans la province de Zagora. L’ACFA a pour but d’aider l’inclusion socio-économique des jeunes filles du village de Tazarine. Elle cherche en particulier à informer les jeunes filles sur le corps féminin et à les décomplexer.
L’association féminine Leila & Nawelle compte des membres maghrébines et françaises. Cette association est active dans la santé, éducation, égalité de genre et prévention des violences, développement économique et activités des femmes, protection de l’environnement et recyclage. Dans la région de Zagota, cette association mène entre autres des campagnes de sensibilisation des jeunes filles contre le mariage précoce.
La réalisation
L’association compte 9 membres exécutifs exclusivement féminin et 17 adhérentes de différents âges et appartenant à 4 douars différents. Cette hétérogénéité n’est pas anodine : Fatima a voulu toucher les mères comme les jeunes filles, de façon à ce que ces femmes informent et sensibilisent à leur tour d’autres femmes de différentes classes d’âge dans leurs douars respectifs.
Fatima, avec l’appui de l’association Leila & Nawelle, a d’abord eu l’idée de confectionner des serviettes hygiéniques lavables. Cette activité permet de distribuer une partie des serviettes aux adolescentes, de générer une source de revenu pour les couturières, et de préserver l’environnement (en évitant la consommation de serviettes hygiéniques jetables).
Fatima a soumis en 2017 cette idée à l’ambassade de France à Rabat dans le cadre d’un appel à projet. Son projet a été retenu et a été financé de l’ordre de 50 000 Dh. Avec cet argent, l’ACFA a acheté du matériel de couture et a fait appel à une formatrice venue de France pour former les 17 couturières. L’association Leila & Nawelle a également contribué à ce projet en faisant un don de 3 autres machines à coudre et en fournissant les tissus nécessaires. Les trois types de tissus utilisés dans la confection des serviettes (coton bio, absorbant et imperméable) sont importés de France.
Les résultats
Cette initiative a très bien été accueillie à l’échelle locale. Le conseil du village a mis à la disposition de l’association la maison des villageois pour installer temporairement l’atelier de couture. Il a également lancé une campagne de collecte d’argent pour leur construire un atelier.
Depuis le démarrage de l’activité en 2017, deux campagnes de distribution gratuite aux jeunes filles du village de serviettes hygiéniques lavables ont été organisées en collaboration avec l’association Leila & Nawelle. En parallèle de ces campagnes, les serviettes sont exportées vers la France pour être vendues dans les marchés de proximité par les membres de l’association. L’argent de la vente est redistribué aux 17 couturières, qui sont rémunérées à 5 Dh/serviette. Quant à la fourchette du prix des serviettes, elle varie en fonction de la localisation de la vente (local ou en France) et en fonction de la taille des serviettes. Localement la serviette est vendue entre 40 et 60 dh et à l’étranger entre 70 et 100 Dh. A la demande d’un groupe françaises retraitées de passage à Tazarine, l’ACFA s’est lancée depuis 2018 dans la confection de protège-slips lavables, vendus à 40 Dh/unité.
En plus des activités de coutures, l’association propose des cours de soutien scolaire en langue (français et anglais), et anime des séances de sport aux femmes (par exemple, foot féminin, footing). L’ACFA en collaboration avec d’autres associations nationales et/étrangères organisent des journées de gynécologie et animent des sessions de débats autour des droits des femmes.
Limites et perspectives
La présidente de l’ACFA, Fatima, a différents projets pour l’atelier, mais qui demandent un appui financier. Parmi ces projets, on peut citer l’agrandissement de l’atelier de couture pour intégrer d’autres femmes, et la diversification de la production avec comme idée la confection de couches-bébés lavables. Cette diversification devrait permettre une meilleure rémunération des couturières. Fatima aimerait aussi que les couturières prennent en main la gestion de l’atelier.
Contact
Présidente de l’ACFA : Fatima El Ayouny ; +212 6 54 47 01 21
Mail : satamouni5@hotmail.fr
Auteur de la fiche: Farah Hamamouche
Date de publication: septembre 2020